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Publié le samedi 3 août 2013
Situation dans les Universités de Ouagadougou : Le Front de résistance citoyenne lance une souscription
Depuis la décision des autorités de suspendre manu militari les œuvres universitaires pour la période des vacances, des rixes et confrontations violentes ont été enregistrées dans les cités universitaires de la ville de Ouagadougou. Une telle décision inopportune au regard des réalités actuelles de nos universités contribue à accentuer la tension sociale dans notre pays qui vit depuis plusieurs semaines un conflit ouvert entre les fossoyeurs de la démocratie et les forces démocratiques organisées au sein des organisations de la société civile et de certains partis politiques.
La crise que traversent nos universités traduit à n’en point douter l’incurie qui caractérise la gouvernance universitaire ainsi que l’absence de volonté politique de nos autorités pour apporter des réponses durables à la crise qui secoue l’ensemble de notre système éducatif.
Le Front de résistance citoyenne exprime sa vive inquiétude face aux méthodes expéditives et musclées des autorités universitaires dans la gestion des conflits avec la communauté estudiantine. L’argument des contraintes budgétaires invoqué pour justifier le déguerpissement des étudiants est plus que révoltant dans un pays où le gaspillage des ressources publiques est devenu le sport favori des dirigeants.
En effet, au-delà des autorités universitaires, c’est la responsabilité des plus hautes autorités de ce pays qui est ici engagée. Cette crise n’est que la manifestation tangible de l’insouciance du gouvernement face aux problèmes des jeunes en général et des étudiants en particulier au moment où ceux-ci par manque de travail se voient obligés de préparer les concours prévues du 2 au 14 août 2013.
Comment comprendre leur entêtement à installer le sénat, dont la mise en place induirait des coûts financiers faramineux, alors que nos universités sont incapables de faire face à leurs missions et leurs responsabilités ? Comment un pays qui prétend à « l’émergence » peut-il se permettre d’affamer et d’expulser les étudiants des cités universitaires en pleine période des concours de la fonction publique et de sacrifier ainsi sa jeunesse, celle-là même qui est censée être l’élite de demain ?
Avec le bouleversement complet du calendrier universitaire et la paupérisation croissante des étudiants, mettre fin aux œuvres universitaires sans avoir au préalable mis en place un « service minimum » relève tout simplement d’une volonté de punir les étudiants. La répression féroce qui s’abat contre les étudiants vise à exercer des représailles pour leur engagement massif sur les sujets brûlants de l’heure : la vie chère, la mise en place du sénat et la modification de l’article 37 de la Constitution. Les arguments spécieux avancés pour justifier la décision des autorités universitaires cachent mal la volonté du régime vieillissant de la 4e République de dégrossir les rangs des manifestants contre la vie chère, la création du sénat et la modification de l’article 37 de la Constitution.
Connaissant la soif de pouvoir et le mépris que les dignitaires de la 4e Républiques ont toujours affiché face à la jeunesse, nous ne sommes pas surpris qu’il martyrise sans état d’âme les étudiants. Réduits en vagabonds et sans domicile fixe, les étudiants souffrent le martyr parce qu’ils sont issus des couches sociales modestes ; ces étudiants ont tout simplement eu la « malchance » d’être fils et filles de paysans, d’infirmiers, de militaires, de menuisiers, de burkinabè de l’étranger en général et de la Côte d’Ivoire en particulier dont le rapatriement des enfants a été vivement encouragé par le premier ministre lors d’un de ses voyages, etc.
En effet, si nos dirigeants les traitent de manière déshumanisante, c’est parce que la plupart d’entre eux n’ont pas leurs enfants dans nos universités. Ces fils à papa, en général paresseux et de niveau médiocre, sont envoyés dans les meilleures écoles du monde, avec les ressources publiques obtenues grâce au pillage systématique de nos maigres économies.
En clair, la question fondamentale que soulèvent la crise universitaire et la violence contre les étudiants est celle de la reproduction sociale et du conflit de classes. D’une part, on favorise une minorité de fils à papa en leur ouvrant l’accès aux ressources publiques, de l’autre, on crée des ghettos pour les enfants des paysans ; les paysans, c’est-à-dire ceux-là même dont le travail productif contribue à l’économie nationale et qui se battent au quotidien pour assurer notre autosuffisance alimentaire. Qu’est-ce que cela signifie pour l’avenir de notre pays ?
Le Front de résistance s’insurge fortement contre cette macabre conspiration contre notre peuple, qui voit sa jeunesse réduite au vagabondage et aux incertitudes. Le Pr Ki-Zerbo disait avec raison que « chaque génération a des pyramides à bâtir ». Comment une jeunesse marginalisée, délaissée et affamée peut-elle construire des pyramides ? Comment peut-elle assumer son rôle historique si ses droits les plus élémentaires sont violés ?
C’est au regard de cette analyse que le Front de résistance citoyenne :
Dénonce la mauvaise gouvernance de nos universités, qui dénote d’un mépris total des autorités de la 4e République vis-à-vis de l’éducation de notre jeunesse ;
Dénonce l’usage disproportionné de la violence par les forces de l’ordre contre les manifestants ;
Exige du gouvernement le rétablissement immédiat des œuvres universitaires de vacances acquises par les syndicats d’étudiants en 2002 auprès du MERSS et la mise en liberté immédiate de tous les étudiants arrêtés ;
Apporte son soutien indéfectible aux étudiants et leur témoigne de sa solidarité ;
Encourage les étudiants à poursuivre par des voies pacifiques leur combat noble pour des conditions d’études décentes, mais aussi pour la défense des idéaux démocratiques ;
Appelle l’ensemble du peuple burkinabè à soutenir les luttes légitimes des étudiants pour une éducation de qualité, à la hauteur de nos ambitions pour un Burkina meilleur ;
Lance une souscription en vue de venir en aide aux étudiants qui sont dans le besoin, et appelle l’ensemble des personnes de bonne volonté à leur apporter tout soutien nécessaire quelle qu’en soit la forme.
La collecte des dons en nature ou en argent se fera par les deux cellules installées à cet effet par les étudiants, l’une au CNP-NZ à Gounghin, l’autre à Semfilms aux 1200 logements. Les modalités de contribution de la diaspora et des personnes vivant en province seront précisées ultérieurement. Notre élan de solidarité sera le témoignage de notre réel attachement à la jeunesse.
Ne laissons pas hypothéquer l’avenir du Burkina Faso ! Fait à Ouagadougou, le 3 août 2013
Ont signé :
ADEP, AMR, AREDA, BALAI CITOYEN, CDCAP, CEJ, CGD, CIDOC, CNP/NZ, COFEDEC, FEPDHA, FOCAL, GERDDES, LIDEJEL, MBDC, MBEJUS, MCB, MMF/ANBF, RAD, RADDHO, RAPPED, SEMFILMS, TON, UJAB