Un colloque pour perpétuer et honorer la mémoire de Sankara, 30 ans après sa mort !
Le président Thomas Sankara est mort il y a trente ans. Mais l’homme est plus que jamais présent dans la mémoire collective et il faut surtout éviter qu’il sombre un jour dans l’oubli. C’est ainsi que le mouvement le Balai Citoyen a tenu à perpétuer et à honorer la mémoire du père de la révolution de 1983 à travers un colloque international qui s’est déroulé du 26 au 27 octobre 2017 à Ouagadougou. Universitaires, chercheurs, étudiants, héritiers de la révolution démocratique et populaire, politiques, citoyens, etc. ont pendant ces deux jours échangé autour du thème : « La révolution burkinabè et l’héritage de Thomas Sankara ». Des témoignages des anciens compagnons et des communications sur les idéaux de l’homme ont suscité autant de passion que de compassion que les conditions et les raisons de sa mort tragique. Thomas Sankara, pour les uns étaient largement en avance sur son temps qu’il n’a pas été compris par ses camarades. Mais pour les autres, c’était un révolutionnaire gênant qu’il fallait tout simplement « liquider ».
15 octobre 1987, au Conseil de l’entente, le président Thomas Sankara a été abattu par un groupe de commandos. Malgré le temps écoulé, soit trente ans après, les enseignements de l’homme traversent le temps et restent intacts. La nouvelle génération buche le discours d’orientation politique (ODP) et semble marcher sur la voie tracée par celui-ci.
Le Balai Citoyen, pour qui, Thomas Sankara est le « premier cibal » a réunis à Ouagadougou, au cours d’un colloque international, universitaires, étudiants, politiques, etc. Pour échanger afin de perpétuer sa mémoire et ses idéaux.
Grand défenseur du continent Noir, Thomas Sankara dans son rapport avec l’occident, voulait un nouvel ordre. Il était celui-là, selon Bernard Zongo, chercheur en diplomatie, qui voulait « gagner la bataille des idées » mais aussi le « respect mutuel et réciproque » en tant que des « États indépendants et souverains ». La volonté de « s’émanciper » vis-à-vis de la France, puissance colonisatrice, était manifeste. De l’aveu de Bernard Zongo, le président du Faso, affichait un désir clair du refus de participer au sommet France-Afrique et exhortait ses pairs à lui emboiter les pas. De ce fait il invitait les autres à voter massivement contre les intérêts de la France aux Nations Unies.
Le Pr Mamadou Coulibaly, chercheur, a exposé sur l’homme nouveau selon la vision de Thomas Sankara. En effet, le père de la révolution burkinabè, selon Me Guy Hervé Kam, porte-parole du Balai Citoyen, menait un « combat juste et d’engagement sans calcul au profit de l’enfant, de l’élève, de l’étudiant, du travail ». Il voulait un nouveau type d’Homme. Celui-ci, selon le Pr Mamadou Coulibaly, se caractériserait par l’appartenance à une famille qui a droit à un nouveau foncier, une nouvelle école adéquate, une nouvelle monnaie et un nouveau système de gouvernance. C’est sans doute ce qui a valu le changement du nom du pays. Cela traduit l’identité culturelle mais l’affirmation de soi car selon Sankara le nom « Haute Volta » ne signifiait rien.
Le secret pour le capitaine de sortir de la dépendance c’était le « contrôle de l’agenda du développement et de la coopération » et cela doit nécessairement passer par l’indépendance monétaire. L’épineuse question du « FCFA » s’est invitée aux débats. Certains étudiants qui se veulent plus « radicaux » préconisent une manière forte pour sortir du FCFA. Morceau choisi : « pourquoi les États Africains ne se lèvent-ils pas à l’unisson et dire à la France « qu’à partir d’aujourd’hui, on ne veut plus de cette monnaie » ? » tonnerre d’applaudissement dans une salle pleine comme un œuf.
Le Dr Ra-Sabalga Ouédraogo semble abonder dans le même sens que l’étudiant. Il s’interroge : « où est Sankara dans ce débat sur le FCFA ? Ce débat qui est porté par des gens qui torpillent les autres et qui sont les dirigeants de la Francophonie ? » Il poursuit son interrogation sur la place qu’occupe Sankara aujourd’hui dans l’occupation de certains pays africains, notamment la Cote d’Ivoire, le Mali, le Niger et le Burkina Faso où se sont les troupes étrangères qui font la guerre dans les parties septentrionales.
Il tient à recadrer certaines choses qui semblent très importantes à ces yeux. Il estime que « Sankara est un rapport à la vérité » et non un « consensus mou qui réunit tout le monde ! » « S’il réunit tout le monde c’est qu’il ne réunit personne », poursuit-il. Il invite l’auditoire à éviter la déification de l’homme : « Sankara n’est pas un chemin achevé ; il n’est pas le chemin ! Il est le chercheur de chemin », a-t-il conclu.
Masbé NDENGAR