Amnesty International : « 2016 a été une année de souffrance et de terreur »
Amnesty International a présenté son rapport 2016/2017 le 22 février 2017 à Ouagadougou. La situation des droits humains est moins reluisante en 2016, constate Amnesty. Pour l’ONG, l’année a été marquée par des « discours pernicieux et déshumanisants ». Des 159 pays et territoires concernés par le rapport, il a été constaté un recul en matière des droits humains. Cela s’explique, selon Amnesty par de nombreux conflits et des élections qui ont rythmé l’année 2016. Si les crises que le Burkina Faso a connues ces deux dernières années se sont calmées, il demeure tout de même des atteintes aux droits humains par des groupes armés. L’épineuse question de Koglweogo revient sur la table de discussion et Amnesty se veut plus clair : « l’État doit prendre ses responsabilités ».
Dans son rapport 2016/2017, Amnesty International a dépeint en noir le tableau des droits humains. L’année 2016 est sombre et est émaillée « des violations du droit international relatif aux droits humains et du droit international humanitaire ». Selon Amnesty, « une politique de diabolisation » avec son corolaire de discours de haine est à « l’origine du recul mondial des droits humains ». 2016 est loin d’être une année qui a donné du sourire aux populations mais bien au contraire : « pour des millions de personnes, 2016 a été une année de souffrance et de terreur », révèle la déclaration liminaire. Les atteintes aux droits humains ont été perpétrées à la fois par les gouvernements et les groupes armés, selon l’ONG. La situation est bien inquiétante : « le monde est devenu encore plus sombre et plus instable en 2016 », a tristement laissé entendre Yves Boukari Traoré, directeur exécutif Amnesty international Burkina Faso.
L’élection de Donald Trump aux États Unis d’Amérique est de nature, à en croire Yves Boukari Traoré, a aggravé la situation : « tel un buffle, on le voyait venir », a-t-il renchéri. En Turquie les chiffres sont alarmants : 90 000 fonctionnaires ont été limogés suite à la tentative de coup d’État du mois de juillet 2016 ; 118 journalistes ont été placés en détention provisoire et 184 médias ont été fermés d’une manière arbitraire et définitive.
L’Afrique comme le reste du monde n’a pas manqué l’occasion de montrer son mauvais visage. D’après Amnesty, les défenseurs de droit de l’homme, les journalistes et les opposants ont été persécutés et violemment réprimés. De l’Afrique du Sud en passant par l’Angola, le Burundi, le Cameroun, la Cote D’ivoire, la RDC, le Togo, le Tchad, etc. Amnesty a noté l’omniprésence de répressions violentes et arbitraires contre les rassemblements et les manifestations. Interdictions de manifester, arrestations arbitraires, détentions, homicides, etc. ont été monnaie courante dans bon nombre des États Africains, d’après le rapport présenté par Amnesty. C’est le cas du Nigeria où selon Amnesty, 100 manifestants pro-Biafra ont trouvé la mort suite à la campagne qui a été lancée contre eux par l’armée et d’autres forces de sécurité.
Au Burkina Faso Amnesty a noté que les taux de mortalité maternelle et de mariage précoces sont restés élevés. Il a aussi souligné qu’au moins 2 800 femmes meurent en couches chaque année au Burkina Faso. Sur le plan judiciaire, l’organisation de défense de droit l’homme a dressé son bilan : 14 personnes ont été inculpées en juin dont l’ancien président Blaise Compaoré pour leur implication présumée dans l’assassinat du président Thomas Sankara ; entre juillet et octobre, 38 des 85 personnes inculpées à la suite de coup d’État de septembre 2015 ont été libérés. Il note également qu’il y a eu des exactions perpétrées par des groupes armées : « tout au long de l’année des groupes armés ont attaqué des civiles et les membres des forces sécurité dans la capitale Ouagadougou et dans le nord du pays, à la frontière du Mali », a indiqué Christian Ouédraogo, Coordonnateur campagne et action Amnesty Burkina Faso qui a confié que des Koglweogo ont commis eux aussi des exactions telles que les passages à tabac et des enlèvements.
La condamnation de l’ancien président Tchadien, Hissein Habré à Dakar et de Jean Pierre Bemba ainsi que l’engagement de certains États à rester membre de la Cour pénale Internationale(CPI) sont des motifs de satisfactions pour Amnesty. Pour Christian Ouédraogo, bien que le monde soit instable, il est possible de faire changer les cours des choses. Mais pour ce faire, l’année 2017 a besoin des héros.
Masbé NDENGAR