Niger : Si j’étais Hama Amadou

PAYS : Niger
DATE DE PUBLICATION : jeudi 19 novembre 2015
CATEGORIE : Blog
THEME : Opinions

Hama Amadou est un grand homme politique nigérien. Il a occupé plusieurs postes de responsabilités dans le pays. De la préfecture à l’Assemblée Nationale, en passant par la Primature, cet homme a gravi tous les échelons. Malheureusement, il est impliqué dans l’affaire présumée « des bébés importés du Nigeria ». Sous le coup d’un mandat d’arrêt émis par la justice nigérienne, il a fui le pays en 2014, laissant derrière lui, sa famille socioculturelle et politique d’une part et son juteux poste de deuxième personnalité du Niger, d’autre part. Après un long séjour en France, il est investi aux élections présidentielles de février 2016 par son parti. Il n’a eu d’autres choix que de revenir au point de départ pour se mettre à la disposition de la justice en laquelle il n’avait pas confiance. Un adage hausa de chez moi dit que : « abinda yasa kusu wuta yahi wutazafi », c’est-à-dire : « le danger qui pousse une souris à se plonger dans le feu est plus chaud que le feu ». Malheur pour le « Maradona » de la politique nigérienne qui, dès sa décente d’avion, a été cueilli par les hommes de droit qui l’attendaient impatiemment. L’opposant Hama Amadou a été écroué à la prison civile de Filingué, une localité située dans l’ouest du Niger.

Moi, je ne peux pas être comme lui, un homme qui a des pions dans tous les services, secteurs publics et para publics et être persécuté par tous. Je ne peux pas avoir son expérience administrative et politique et me perdre dans les calculs. Hama a servi tous les régimes politiques qui se sont succédé au Niger de la dictature à la démocratie. Il a un CV très lourd. Il a été à un moment l’homme politique le plus influent du pays. Aujourd’hui, il paie cher. Un adage dit aussi que : « qui sème le vent, récoltera la tempête ». Ali Boda n’a pas menti quand il disait : « A chaque fois qu’on parle d’apogée, il y a certainement un déclin derrière, quelle que soit la durée ».

Impliqué dans toutes les magouilles politiques, Hama Amadou est aujourd’hui dépassé par les événements. Quand il a quitté l’alliance politique qui a porté le président Issoufou Mahamadou au pouvoir en 2011, il s’était vite rallié à l’opposition tout en gardant son poste de Président de l’Assemblée. Cela a fait grincer les dents du camp au pouvoir. Les présidents de l’Assemblée de l’Afrique sortent généralement du rang de la mouvance présidentielle. Après de vaines tentatives timides de le déloger de son perchoir, il s’est vu forcé de quitter le pays puisque impliqué dans l’affaire présumée de trafic international de bébés au Niger. En dépit de son influence et de son poids social et politique, il a amassé des sommes d’argent colossales. L’ancien président de l’Assemblée nationale du Niger veut agrandir la liste de ses héritiers génétiques. Dieu pour les uns et la nature pour les autres n’a pas agréé légitimement son vœu. L’homme de Youri (son village natal), a voulu forcé par tous les moyens comme il le faisait en politique ne serait-ce que par « copier-coller ».

Donner naissance à des jumeaux est un don que beaucoup de couples n’ont pas. Selon certaines statistiques, le nombre de jumeaux ou triplés de la population mondiale est estimé à environ 125 millions (1,9 %) de la population, dont seulement 10 millions de « vrais jumeaux ». Il naît en moyenne une paire de jumeaux pour 85 naissances. C’est ainsi qu’à la surprise de beaucoup des Nigériens, l’épouse de cet homme qui semblerait manquer du « jus » qui féconde, donne naissance au Nigéria à des jumeaux. Personne n’imaginait un tel scénario. Les investigations ne sont pas permises car selon la loi musulmane, si ton épouse accouche chez toi, même si c’est par adultère, l’enfant t’appartient. Je sais que c’est difficile à croire mais la loi c’est la loi. Seulement, le cas de supposition d’enfant ne fait pas partie. Raison pour laquelle, la joie de ceux qui ne savent pas comment cela s’est passée, a été de courte durée.

S’il arrive à satisfaire la justice, il est grand temps pour lui de retourner au village. Il peut construire et mettre en place le confort de son choix. Il se donnera un temps pour contempler la nature avec toute sa beauté. Il serait loin de curieux, loin de Niamey et loin de ces ennuies politiques dont il s’est forgées lui-même.
L’homme de Youri (tout le monde d’ailleurs) doit savoir que sur le terrain politique et syndical, il faut t’attendre à être de fois interpellé et même envoyé en prison par le juge. Lorsque tu écartes cette donne, vaut mieux te soustraire et rester hors de ces terrains comme moi. Quand tu choisis de faire le syndicalisme ou la politique, il faut t’assumer. Malheureusement, ceux qui ne s’assument pas prennent la poudre d’escampette à l’image de ce revenant qui crie au complot. Une chose est sûre, je ne serai jamais un politicien.

Article initialement publié sur le blog de Tejane

« Le rôle des intellectuels n’est pas de participer à la lutte pour le pouvoir. Encore moins de chercher à l’exercer. Leur rôle est, précisément, de se dessaisir autant que possible de tout pouvoir, de renoncer à l’exercice de tout magistère. Il n’est pas d’interpeller qui que ce soit. Il est de se faire, pour une fois, les maîtres de l’ascèse. »

Achille MBEMBE, historien et politologue camerounais in « Le lumpen-radicalisme et autres maladies de la tyrannie », publié dans le MONDE Afrique

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